Face à la cavalerie financière des Etats, les mesures de la BCE -au départ plus prudente que la FED- sont de plus en plus massives et…inefficaces.
Fin 2008, la BCE abaisse les taux directeurs (le taux auquel l’argent est prêté aux banques) pour inciter les banques à prêter aux entreprises et aux ménages et donc de relancer, comme avant, l’économie par la dette.

Cela ne fonctionne pas (les banques préfèrent investir dans la bulle immobilière chinoise, les matières premières agricoles…etc) et plusieurs états européens (Grèce, Irlande, Portugal) remboursent leurs dettes avec de nouveaux emprunts (cavalerie financière) à des taux d’intérêts de plus en plus élevés. A partir de 2010, les médias s’emparent du sujet : la presse britannique et américaine insiste davantage sur ces États que sur le Royaume-Uni ou les États-Unis, dans une situation budgétaire pourtant plus grave.

Face à cela, la BCE rachète à partir de 2010 des créances souveraines qui perdent de la valeur et dégradent le bilan comptable des banques. Elle rachète donc les dettes que les peuples et entreprises doivent aux banques pour éviter que les banques ne fassent rapidement faillite. C’est le programme Securities Market Programme (SMP).

En janvier 2011, dans le silence quasi complet des médias, la BCE autorise l’Irlande à créer 51 milliard d’euro pour sauver ses banques.
En janvier 2012, avec près de 220 milliards d’obligations souveraines rachetées et un bilan en forte augmentation, la BCE est dans la situation suivante :
Mario Draghi, ancien vice-président Europe de la banque américaine Goldman Sachs (accusée d’avoir falsifié les comptes publics de la Grèce tout en spéculant sur sa dette) et ayant un fils trader sur les taux à Londres (potentiel conflit d’intérêts), devient président de la BCE. Il doit composer avec un Conseil rempli d’autres gouverneurs divisés sur l’idée de repousser ou non la faillite en créant de l’argent pour racheter tous les mauvais actifs bancaires du continent :

Les banques européennes utilisent les facilités de crédit mises à disposition par la BCE car elles ne se font plus confiance entre elles depuis Lehman Brothers et le retournement de la pyramide mondiale de dettes : toutes les créances perdent de la valeur, donc les banques cherchent à les vendre et elles perdent encore plus de valeur. Comme les bilans des banques deviennent très mauvais, il faut d’une part que chaque banque assure son refinancement à court terme (payer ses emprunts hebdomadaires voire quotidiens) et d’autre part qu’elle se débarrasse de ses créances pourries (en les refilant à la BCE) tout en investissant dans des secteurs encore porteurs (la nourriture, les matières premières et les sociétés les plus innovantes, souvent dans les pays réémergents).


La politique européenne de la BCE, avec les gouvernements européens, repose aussi sur le Fonds Européen de Stabilité Financière (FESF), sensé se transformer en Mécanisme Européen de Stabilité quand tous les Etats de la zone euro l’auront accepté : l’idée est de forcer les gouvernements à fournir de l’argent à une “banque” privilégiée chargé de faire ce que la BCE n’a pas le droit de faire, créer de l’argent pour acheter les dettes du continent et repousser la faillite.
Dans ce mécanisme, l’Espagne, l’Italie, la France et surtout l’Allemagne seraient les principaux contributeurs. Cela dans un contexte où l’opinion publique allemande, comme les Pays-Bas, est de moins en moins prompt a payer pour les Etats du sud de l’Europe, plus surendettés qu’eux, par le biais du système Target 2 où les banques centrales nationales compensent leurs dettes entre elles :
Les mesures de la BCE permettent de maintenir artificiellement les indices de la Bourse à des niveaux corrects et de retarder les faillites des banques et et des Etats, pour quelques semestres. Mais elles sont inefficaces sur l’économie réelle, qu’il s’agisse de la production industrielle, de la croissance du PIB ou du chômage. Pendant ce temps, le bilan de la BCE augmente considérablement et la stérilisation de l’argent créé est de moins en moins garantie : quand la BCE “imprime des billets” pour acheter de la dette, elle espère que les banques vont ensuite lui placer la même somme en dépôt et que la masse monétaire n’augmentera pas comme aux Etats-Unis. Un pari très risqué…

Le 6 septembre, Mario Draghi, président de la Banque Centrale Européenne, a même annoncé racheter de la dette SANS LIMITE pour les trois prochaines années, pourvu que les pays bénéficiaires respectent leur obligation d’austérité envers les populations.
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